Hommage à Neal Adams : nos bat-planches préférées
Publié le 06 mai 2022 par Moyocoyani
La légende Neal Adams nous a quitté le 28 avril 2022, à l’âge de 80 ans, une nouvelle qui a d’autant plus affecté l’équipe de Batman Legend que nous l’avions rencontré en 2018 pour une interview, et avions su apprécier sa vivacité d’esprit, son immense gentillesse ainsi, bien sûr, que les histoires passionnantes d’un artiste actif depuis 1960 et jusqu’à aujourd’hui !
Batman n’aurait pas été le même sans Neal Adams qui, avec le scénariste Dennis O’Neil, l’a fait entrer dans l’âge sombre après des années 1960 plus… colorées. Adams a ainsi contribué à la création de Ra’s al Ghul et de Man-Bat, au retour de Double-Face et du Joker comme clown psychopathe, tandis que l’audace de son trait rendait le super-héros plus mémorable, dynamique et impressionnant que jamais.
À la même époque, son travail chez Marvel marqua presque autant les esprits, notamment sur les X-Men, tandis qu’il dessinait le fondamental Green Lantern/Green Arrow, pierre angulaire du « comics pertinent ».
Mais Neal Adams n’avait pas été que l’un des dessinateurs les plus importants de l’histoire du comics super-héroïque : il lutta pendant toute sa carrière pour la reconnaissance des droits des créateurs, notamment la récupération par les artistes des planches originales, jusque-là détenues par les maisons d’édition, et le versement d’une somme historique de DC Comics à Siegel et Shuster pour la création de Superman.
La légende rejoint son collaborateur Dennis O’Neil, décédé en juin 2020 (voir notre hommage ici), mais son travail continuera de vivre.
Si nous avons été touchés comme amateurs de comics, nous avons naturellement ressenti le besoin de lui rendre hommage en tant que passionnés de Batman, et avons décidé de présenter chacun une planche préférée liée à Batman dans son travail.
La planche d’Alexandra : Batman #251
Neal Adams a repris Batman à la fin des années 60, début des années 1970 pour en faire une icône de la pop culture. Et qui est Batman sans le Joker ? Dans ce récit, le Clown a ses origines : violentes et gratuites. Le scénariste l’a replacé dans cette dimension sanguinaire pour en faire le personnage que l’on connaît tous. Sans limites, fou et obsédé par le Chevalier Noir. Cette planche résume pour moi tout le travail extraordinaire de Neal Adams. Ce Joker énorme prenant Batman sur cette carte à jouer. Les couleurs pétantes de l’époque qui ont marqué les esprits ; ce vert dans les cheveux et le bleu du costume de Batman. Et bien sûr le rire strident exprimé par le Ahahaha. Poignant et inoubliable, il a su changer les codes tout en respectant le bat-univers.
La planche d’Aliénor Drake : “Le démon a ressuscité”
“Le démon a ressuscité” est une des histoires illustrées par Neal Adams, qui m’a le plus marquée. La couverture remarquable, et les planches saisissantes, représentant un Batman à la fois grandiose et vulnérable, qui rencontre enfin un ennemi à sa hauteur et capable d’extérioriser la fureur et la passion de notre héros.
La planche de Bruno (Andresy) : World’s Finest #244
Je ne revendique pas, loin s’en faut, le titre de meilleur connaisseur du Bat-Verse dans notre sympathique Team “Batman Legend“. En revanche, je tiens à assumer mon rôle de doyen. Commençons donc par l’histoire d’un petit garçon qui, dans les années 70, attendait impatiemment le mercredi pour aller avec son grand-père chez le marchand de journaux pour y acheter … “Superman Magazine”. Eh oui…. Mon premier contact avec Batman, dans les comics, fût clairement par le biais de l’homme d’acier. Et déjà à l’époque, on sentait, malgré la naïveté de l’enfance deux (super-)héros bien différents.
A cet age là, on ne s’attarde guère sur le nom des auteurs et encore moins sur celui des dessinateurs. Et pourtant, c’est bien plus tard que j’ai compris que Neal Adams et son compère Dennis O’Neil ont bercé (au moins en partie) tout un pan de mon enfance. Avec ce graphisme si reconnaissable (en particulier, les cheveux noirs aux reflets bleus, qui, avouons-le, m’ont toujours étonné). Cette marque graphique qui, longtemps pour moi, a fait office de référence. Et malgré (je le compris bien plus tard) l’emprise de plus en plus ténue du Comic Code Authority, des histoires qui (re)devenaient sérieuses voire graves.
C’est un choix finalement assez naturel pour moi d’avoir choisi cette couverture de “World’s finest comics” le numéro 244 daté de mai 1977. Petit calcul…… j’avais 7 ans et demi. On y retrouve les deux figures emblématiques de DC sur la couverture signée du grand Neal, avec en guest-stars, Black Canary, Wonder Woman et Green Arrow (dont j’avoue, à part la seconde, être passé complètement à côté durant mon enfance)
Le grand Neal que j’ai eu la chance de croiser à la Comic Con, il y a quelques années. J’en garde le souvenir d’un homme simple, souriant et disponible, qui semblait porter sur tout ce joli monde qui venait le voir un regard amusé et bienveillant. Le monde présent et la timidité m’ont empêché de le remercier pour avoir fait germer ces souvenirs il y a tant d’années. Je n’ai pu que lui tendre son tome 1 de “Batman La légende” aru chez Urban Comics pour qu’il puisse y apposer sa signature. Peut-être aura-t-il entendu dans mon “Thank You very much Mr. Adams” quelque chose de plus profond que la seule gratitude de ce paraphe. Et je gage ne pas être le seul dans ce cas-là.
Thank You very much, Mr. Neal
La planche de Nico : Batman Tales of the demon
Je vous avoue qu’il a été difficile de faire un choix tant le travail de Neal Adams sur Batman a été remarquable… Toutes ses couvertures par exemple ont un niveau de détail assez époustouflant !
Finalement, comment ne pas parler de Ra’s Al Ghul lorsque l’on parle du travail de Neal Adams ? C’est certainement l’un de ses plus grands apports au batverse. J’ai donc choisi cette sublime couverture de Batman Tales of The Demon, un dessin remarquable sur beaucoup de niveaux. Déjà sur l’expression des émotions des personnages présents. Alors que l’on aperçoit Robin à terre, Adams parvient à retranscrire la rage qui traverse Batman face au corps inerte de son pupille. Talia est en arrière plan, contemplant la scène alors que Ra’s est représenté comme un véritable “démon”.
Une planche sublime que j’adore et qui, je trouve, représente assez bien le travail de Neal Adams sur Batman.
La planche de Siegfried : Batman #244
Je vais faire le choix le moins original du monde avec la couverture de Batman #244 (septembre 1972), culte non parce qu’elle semble annoncer la mort du héros (c’est un cliché récurrent des couvertures depuis la fin des années 1960) mais parce qu’elle clôt l’arc le plus mémorable alors consacré à Ra’s.
Et ce que l’on y voit a de quoi marquer les esprits, déjà par le visage déformé par la douleur du héros, que son ennemi domine complètement. On l’a dit, la mort prétendue du héros est un cliché de couvertures, dont l’objectif est d’intriguer le lecteur qui se doute bien de la survie et du triomphe final du personnage principal, et ne peut manquer de se demander comment il se sortira de cette mauvaise passe. Or c’est particulièrement vrai ici, où Batman semble absolument défait, au point que Ra’s et sa caravane sont déjà sur le départ, convaincus d’avoir tué l’homme chauve-souris. Leur erreur pose alors autant de questions que la manière dont Batman pourra se relever.
Signalons d’ailleurs qu’à la fin du fascicule précédent, c’est Ra’s qui était diagnostiqué mort et bien mort, de sorte qu’en une couverture à peine, la situation est complètement et invraisemblablement retournée !
Le regard de Ra’s dit beaucoup : alors qu’on attendrait un rictus triomphant, il semble davantage inquisiteur, comme s’il cherchait à s’assurer de la mort de Batman, et d’autant plus respectueux qu’il semble s’emparer de son costume comme d’un trophée.
Que les deux belligérants soient torse nu suggère d’ailleurs bien un certain respect mutuel, tout en permettant de représenter Batman d’une façon… inhabituelle : tous deux ont accepté de se déparer de leurs artifices pour se mettre à nu dans un duel à mort, mais à la loyale. Et tout cela dans un environnement original pour un Batman certes assez baroudeur dans cet arc, et que l’on n’attendrait pour autant pas avec un sabre dans un désert, le contraire le plus parfait de la vie, de la verticalité et de la modernité de Gotham.
Ainsi, grâce au talent de Neal Adams, la couverture remplit-elle exemplairement son cahier des charges, en racontant beaucoup par ses détails, ses poses, ses regards, tout en posant mille questions rendant la lecture du fascicule incontournable.
Et vous, quelle est votre planche préférée de Neal Adams, y compris en dehors de ses comics Batman ? 🙂
On reste connecté ? 🙂
Retrouvez-nous sur Facebook, Twitter et Instagram.