Review de Doomsday Clock
Publié le 23 octobre 2020 par Nico
Doomsday Clock nous parvient enfin avec cette publication chez Urban Comics. Que vaut ce projet titanesque qui a pour ambition de réunir pour la première fois les héros de DC Comics et l’univers des Watchmen ? Les auteurs Geoff Johns et Gary Frank se sont-ils montrés à la hauteur ? Laissez-moi vous présenter mon point de vue (Sans spoilers).
Synopsis
Il y a trente ans, sur une Terre où le cours de l’Histoire a évolué de manière bien différente, un justicier milliardaire nommé Ozymandias a tenté de sauver l’humanité d’une guerre nucléaire imminente en concevant une machination effroyable… et réussit. Mais, ses plans ayant été révélés, ce dernier dut prendre la fuite et tente à présent de retrouver le seul être capable de restaurer un équilibre sur sa planète : le Dr Manhattan, surhomme omnipotent. Un seul problème s’offre à lui : le Dr Manhattan a quitté sa dimension pour visiter celle de la Ligue de Justice et interférer avec le cours des événements, manipulant à leur insu les héros de cet univers. Mais pour Ozymandias, ce défi n’est qu’un obstacle de plus dans sa quête d’une paix éternelle pour son monde et ses habitants : résolu, il décide de franchir la barrière entre les dimensions quitte à y affronter ces métahumains.
- Scénario : Geoff Johns
- Dessins : Gary Frank
- Publié le : 23 Octobre 2020
- Nombre de pages : 448 pages
- Prix : 35€
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Un hommage à Watchmen…
Je sais que vous êtes nombreux à vous poser cette question : “Faut-il avoir lu Watchmen avant de lire Doomsday Clock ?”.
La réponse est bien évidemment : OUI ! Non pas qu’il faille l’avoir lu absolument avant de s’attaquer à la lecture de Doomsday Clock puisqu’il vous suffirait d’avoir vu le film de Zack Snyder (très fidèle au récit original) pour pouvoir comprendre la majeure partie de l’ouvrage. Mais dans une oeuvre (et un univers) aussi riche que Watchmen, ce serait dommage de passer à côté de certaines choses lors de votre lecture… Par contre si vous n’avez ni lu ni vu le film Watchmen, passez votre chemin pour le moment. Ce récit n’aura pas grand intérêt pour vous.
Venons-en au fait ! Doomsday Clock reprend la plupart des éléments qui ont fait de Watchmen ce qu’il est : Ambiance politique délétère, découpage des planches en gaufrier, présence des médias (le kiosque à journaux est remplacé par la TV, et le discours du kiosquier par les discussions des personnes âgées en maison de retraite devant leur poste de télévision), une place centrale donnée au temps, ou encore les conflits internationaux qui menacent l’existence même de l’humanité.
Les auteurs s’appliquent à nous retranscrire un univers fidèle à Watchmen, ce qui représente à coup sûr l’un des gros points forts du récit ! On y retrouve d’ailleurs plusieurs personnages principaux comme Ozymandias, Rorschach, le comédien et bien sûr le Dr Manhattan. Nous noterons tout de même l’absence de deux personnages majeurs de Watchmen avec le Spectre soyeux et le Hiboux… Dommage, même si l’on comprend assez rapidement qu’aucun rôle ne pouvait vraiment leur être accordé dans ce récit.
L’histoire nous présente le duo composé de Ozymandias et de Rorschach, partant à la recherche du Dr Manhattan. Ce dernier aurait quitté leur dimension (aurez-vous deviné dans quelle dimension il se serait rendu ?).
Pourquoi le Dr Manhattan a-t-il décidé de venir dans la dimension de nos super-héros favoris ? (Serait-ce pour obtenir l’autographe de Batman ?) Ceci représente l’intérêt principal du récit et je vous laisserai le découvrir lors de votre lecture 😉
Concernant Rorschach, ce dernier est en réalité une nouvelle version du héros que l’on a connu dans Watchmen (cf la fin de Watchmen ^^). Habilement lié au premier Rorschach, on appréciera la découverte de ce personnage, qui obtiendra un véritable rôle central dans le récit.
Doomsday Clock n’est finalement qu’une rencontre entre deux univers que l’on aime apprécier. Ce qui n’est pas inintéressant en soit, même si l’on se demande parfois quel est le véritable intérêt d’un tel récit ? Peut-être que cela n’est rien d’autre qu’un plaisir coupable ? On appréciera d’ailleurs la rencontre entre le Comédien et les vilains de l’univers DC (ils devraient s’en rappeler, tant la comparaison avec Batman est brutale ^^).
…Plus qu’un récit ambitieux ?
Cependant, Doomsday Clock souffre du syndrome de la “suite forcée”. Car oui, Watchmen n’est pas conçu pour avoir une suite et cela était peut-être mieux comme ça… Sans vouloir dévoiler quoi que ce soit d’important dans le récit, ce dernier souffre parfois d’un certain manque de cohérence par rapport à ce que représente Watchmen.
On se demandera également si Doomsday Clock apporte réellement quelque chose ? Ne fait-il finalement pas soulever plus de questions que de réponse ?
Malgré son caractère à dimension politique internationale basée sur un conflit ouvert avec l’ensemble des “méta-humains” présents sur la planète, et une histoire assez dense, le récit sait alterner entre scène d’action, dialogue et enquête. Ce qui rend la lecture assez fluide.
Les auteurs aiment nous amener à l’interrogation : Que fait le Dr Manhattan à Gotham ? Quel est le plan d’Ozymandias ? Quels sont les rôles du Comédien et de Rorschach ?
Là aussi, un bon point pour tenir le lecteur concerné pendant durant ces 448 pages 😉
Je vous parle beaucoup de l’univers des Watchmen (mais il faut avouer que l’univers des Watchmen transpire beaucoup plus du récit que l’univers DC), mais les personnages de DC Comics sont également bien représentés. On y découvre un Joker très drôle que j’ai trouvé très bien écrit. Alternant entre folie et… folie ?
Enormément de personnages DC (plusieurs dizaines) sont présents, que ce soit du côté des héros avec principalement Batman, Superman, Firestorm, etc… ou des super-vilains avec Lex Luthor, le Sphinx, Black Adam, etc… Malheureusement, la plupart n’ont pas vraiment d’intérêts pour l’histoire… Dommage.
J’en viens finalement au plus gros point noir du récit pour moi… Car malgré tous les hommages que rend le récit à Watchmen, la conclusion de Doomsday Clock résonne chez moi comme une fausse note tant cette dernière vient déconstruire tout un pan de la mythologie Watchmen… Alan Moore a dû apprécié (je sais, il n’a même pas dû le lire :p ).
On termine malheureusement sur un malheureux : “Tout ça pour ça ?” (je vous l’avais dit, c’est le fameux syndrome de la “suite forcée”).
Un petit point sur les dessins avant de conclure cette review. Gary Frank (dessin) et Brad Anderson (colorisation) nous livrent un travail fantastique. Si le récit se veut aussi bien imprégné de l’atmosphère des Watchmen, cela est certainement dû en grande partie au travail des deux artistes. Un pur régal pour les yeux.
Conclusion
Tout fan des Watchmen prendra certainement plaisir à retrouver cet univers dans les planches de Doomsday Clock, qui nous présente la rencontre entre deux univers incroyablement denses. Les auteurs prenant bien soin de retranscrire une atmosphère semblable au Watchmen original. Malgré tout, le récit souffre de quelques problèmes majeurs que j’associe au syndrome de la “suite forcée”. Le type de récit qui n’est initialement pas conçu pour avoir une suite…
Le réconfort viendra donc de l’hommage que rend le récit à son prédécesseur plutôt que dans son originalité.
- L’ambiance Watchmen,
- Une fusion réussie entre deux univers.
- Une suite qui n’était pas nécessaire,
- Beaucoup de personnages non exploités,
- Tout ça pour ça ?
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Et l’on voit alors que le but de Geoff Johns était le plus clair et « carré » possible…
Tout est limpide dans son récit, qu’on peut suivre sur deux axes : au premier degré, l’un qui invente de nouveaux vilains amusants et exploite des idées de complots et d’enquêtes (typiquement « DC »), dont la principale a été teasée de longue date – même si l’arc sur les métahumains américains méritaient une histoire à part.
Ainsi qu’une sorte de nouvelle théorie permettant de mieux cartographier la chronologie mouvante des publications DC, sous un angle assez cohérent…
L’autre qui pousse le concept (auto-contenu) de Watchmen au delà du récit d’origine: Contrairement aux Before Watchmen, qui n’étaient surtout que des exercices de dessins et de narration mais sans apporter autres chose que de l’explicite, là tout prend sens en étendant cette histoire plus loin… Ce qui amène celle-ci à forcément annihiler la boucle pragmatique et assez cynique qui concluait le tout.
En somme, si on continue cette histoire, alors le plan d’Ozymandias ne peut que s’écrouler, et le détachement de Manhattan aussi, qui ne pourra ainsi s’empêcher de passer vraiment à l’action, de manière concrète, au lieu de laisser les choses se faire…
Ce qui vient modifier aussi l’utilisation de Superman et Batman dans un récit, lesquels devront ici cesser de tenter d’agir car toutes leurs tentatives échouent… Pour devenir à la place ce qu’ils représentent dans notre monde réel (qui ressemble plus à celui de Watchmen): des Inspirations, des modèles métaphoriques qui conseillent sur la bonne marche à suivre ceux qui ont les seuls pouvoirs utilisables.
On n’est aussi pas très loin de la méthode de la série tv Watchmen, qui étendait aussi la réflexion vers des pistes plus fouillées et modernes.
Tout ça avec une partie graphique qui ne fait pas que réutiliser toutes les idées originelles de Watchmen (gaufrier, gros plans, images récurrentes sur des cases proches ou éloignées, références populaires, citations, « documentaires bonus » etc)…
Elle en retourne aussi le sens, d’un Veidt qui n’est plus un sosie de Ryan O’Neal mais de… Tom Cruise !?… À la véritable teneur de la couleur rouge se déversant sur l’horloge qui ferme chaque chapitre de la série…
Et bien d’autres encore.
Certes, il y a sûrement eu des changements apportés au fur et à mesure, nourries des divers réflexions récentes dans la Pop Culture…
Sans compter que les comics DC de ces dernières années ont une utilisation problématique de la synergie, puisqu’au final chaques auteur écrit son histoire dans sa propre temporalité… Laquelle n’a aucune cohérence avec celle des autres – par exemple, dans les autres comics il y a eu le signe de la Fatalité dans le ciel, censé être simultané dans tous les numéros du même mois… mais qui au final ne peut pas l’être quand des personnages sont censés le voir à la fois dans leur série solo Et dans celle de la Ligue de Justice.
Pareil, ici Doomsday Clock (supposé se passer dans un futur proche) « annule » certaines morts et changements récents, puis imposent à sa manière les siens, publiquement connus chez l’auteur (JSA – Superman – Légion !!!), en attendant que tout finisse par mieux s’aligner sur le même tempo.
On peut toutefois l’apprécier pour le fait qu’il s’agisse surtout d’un récit plutôt direct, avec des personnages qui savent ce qu’ils disent et qui le font…
Récit qui voudrait bien lutter contre l’abus de tergiversations…